Série sur les habitudes missionnelles 

Et si on prenait l’habitude de bénir trois personnes différentes chaque semaine?

L’idée derrière l’habitude

La première fois que j’ai amené cette idée aux jeunes adultes de mon petit groupe, j’ai tout de suite constaté que malgré le fait qu’on entende régulièrement le terme « bénir » dans l’Église, il nous était difficile de bien saisir son sens et sa portée. En d’autres mots, qu’est-ce que ça veut dire concrètement de  « bénir » quelqu’un? 

Étymologiquement, l’une des connotations du mot « bénir » dans la Bible fait référence au fait de « renforcer le bras d’une personne », image que personnellement je trouve fascinante! Tout de suite, mon imagination me fait voyager jusqu’à l’histoire de Moïse et des deux gars pendant la bataille des amalécites (Ex 17.11-13). Tu sais, ceux qui ont soutenu les bras de Moïse tenant le bâton qui – tant qu’il était dans les airs – assurait la victoire de l’armée du peuple d’Israël? Sinon je pense aussi à de nombreux psaumes qui parlent d’un bras qui nous soutient (29.11; 147.13) et qui font un lien quasi-synonyme entre la bénédiction et la force (139.10; 18.36). 

Mais qu’est-ce que ça veut dire d’ajouter de la force au bras d’un autre? En gros, c’est tout ce qui soulage le fardeau de la vie, tout ce qui l’aide à mieux respirer, tout ce qui l’encourage à continuer ou qui soulage sa détresse. C’est de lui souhaiter le shalom au sens biblique, c’est-à-dire, la pleine paix dans chaque dimension de la vie de la personne – en un mot, l’harmonie, l’épanouissement, le (vrai) bonheur.

Qu’il soit un petit ou un grand geste, l’action de bénir quelqu’un peut prendre (au moins) trois formes différentes : les paroles valorisantes, les services rendus et les cadeaux. Peu importe la forme qu’il prend, le geste posé doit venir d’une intention aimante et vouloir le bien de la personne (lui venir en aide, la « gâter », lui communiquer notre reconnaissance, etc). 

Le fondement chrétien de l’habitude

Je peux presque entendre certains d’entre vous réfléchir à voix haute : « OK, mais là, c‘est quoi la différence entre ça et juste le fait d’être une personne avenante dans la société? Qu’est-ce qui fait de cette habitude quelque chose de chrétien et pas simplement quelque chose de gentil? » Je pense que pour ça, il faut prendre un pas de recul pour mieux se situer dans l’histoire biblique – celle d’un Dieu qui déborde de générosité et de grâce envers nous les humains, qu’on soit croyants ou non. C’est le moteur même de la mission de Dieu envers nous (Jn 3.16; Ps 136; 1 Jn 4.7-10; Jn 15.9-17; 2 Co 5.14-20). 

C’est cette générosité extravagante initiale qui nous remplit à rabord de sorte qu’on ne peut plus se contenir : on doit déverser le trop-plein de cet amour ridicule-là aux autres! On ne peut pas garder ça pour soi! Donc, pour le dire très rapidement, la différence entre un service rendu par un chrétien et un service rendu par quelqu’un qui ne connaît pas Jésus, c’est le motif du cœur. Le chrétien rendra service en réponse à ce que Dieu a déjà fait pour lui en Jésus-Christ. Juste ça, c’est suffisant pour rendre cette habitude pleinement chrétienne. 

Mais pour aller encore plus loin, deux choses doivent être notées. 

D’abord, on voit que l’éthique (les bonnes actions, les bons choix) occupe une place importante dans la vie du disciple autant dans l’Ancien que le Nouveau Testament. Après tout, l’enseignement le mieux connu de Jésus, le sermon sur la montagne, porte sur les gestes d’une vie influencée par le Règne de Dieu (Mt 5-8; Lc 6.20-49). 

Deuxièmement, l’amour concret de notre prochain se situe au centre de notre propre appel à nous joindre à la mission de Dieu dans le monde. Je pense que c’est la raison pourquoi, selon une étude qui peut rendre inconfortable, les missionnaires internationaux qui sont allés servir dans le but de bénir un pays ont eu un impact beaucoup plus significatif par rapport à leurs collègues qui ont priorisé l’évangélisation et la conversion des âmes. Quelles que soient nos bonnes intentions, on dirait que les gens ne s’intéressent pas à ce qu’on a à leur dire tant qu’ils ne voient pas qu’on s’intéresse vraiment à leur bien-être

Astuces pour adopter l’habitude

Je termine sur une note plus pratique : voici quelques conseils, trucs et astuces en méli mélo. 

  1. Assures-toi de bénir sans t’attendre à recevoir en retour. D’un côté, bien sûr qu’on espère voir Dieu agir dans notre témoignage « en action » mais tout comme Dieu nous a donné gratuitement, donnons gratuitement! Évite de bénir une personne en échange d’obtenir le droit de lui parler de Dieu : on ne marchande pas l’évangile (c’est mal) et c’est limite manipulateur. 
  2. Idéalement, la personne bénie doit se sentir « béni.e ». Je te dirais que – comme dans les échanges de cadeaux à Noël – c’est pas mal la base (Ph 2.3-4; Pr 27.14). 
  3. Les bénisseurs doivent devenir les élèves de ceux qu’ils bénissent. C’est la suite logique du point précédent : pour vraiment bénir une personne, on doit la connaître — donc l’étudier!
  4. Il y a zéro garantie que les gens ne se méprendront pas sur nos motivations ou qu’ils ne nous mépriseront pas (quand même) pour notre foi. C’est possible et c’est un risque à prendre (remarque comment 1 Pi 3.15-16 termine). Ultimement, on ne fait pas ça pour attirer la faveur des humains mais pour les initier au grand amour de Dieu. 
  5. Point super important : vise un mix! Règle générale : il ne faut pas bénir uniquement les chrétien.ne.s, mais aussi ceux qui ne le sont pas! Par définition, ton geste doit être connecté au peuple de Dieu et être ouvert sur le monde sinon ça ne peut pas être missionnel. 

Tout ça pour dire que je t’invite à essayer cette habitude avec moi. 🙂  


Défi : bénis trois personnes cette semaine, dont au moins une n’est pas membre d’une Église.


Pour aller plus loin

  • T’inscrire à du bénévolat – tu peux faire une recherche en ligne à partir d’une cause qui te tient à cœur, regarder les opportunités près de chez toi, ou encore explorer ce site. D’ailleurs c’est certain que ton école aura des occasions de bénévolat à te proposer, il suffit de contacter la vie étudiante à ton campus! À P2C, on aime particulièrement Red Frogs, Innovation Jeunes et Dans la rue
  • Faire une étude biblique sur la tonne de versets bibliques que j’ai mentionnée en note de bas de page – c’est encore mieux si t’es accompagné d’un.e ami.e! 

Note de l’éditrice : Cet article est le premier d’une série (de douze) qui présente les 5 habitudes missionnelles développées par Michael Frost dans son livre Surprise the World! Chaque habitude sera couverte par deux articles : une présentation et une histoire. Nous espérons que cette série te donnera des idées et des outils sur la manière de vivre ta foi dans le monde, afin que tu sois prêt.e à répondre à toute personne qui s’interroge sur l’espérance qui est en toi (2 Pierre 3.15-16). 


1 Les trois viennent du livre Les 5 langages d’amour de Gary Chapman en passant! Tu peux en apprendre davantage par ici : des-livres-pour-changer-de-vie.com/les-langages-de-lamour/

2 À titre d’exemple tous ces versets parlent de l’éthique du croyant uniquement envers les personnes marginalisées dans la société (ça donne une idée) : Ex 22.21; Ex 22.22-23; Ex 23.3; Ex 23.6; Ex 23.11; Ex 30.15; Lv 23.22; Lv 25.35; Dt15.7; Dt 15.10; Dt 15.11; Dt 24.14; Dt 27.19; 1 Sm 2.8; Jb 20.10; Jb 22.8-10; Jb 29.11-13; Jb 30.25; Jb 31.16-23; Ps 12.6; Ps 72.4; Ps 72.13; Ps 82.4; Ps 82.5; Ps 113.8-9; Ps 140.13; Ps 146.10; Pr 14.31; Pr 19.17; Pr 21.13; Pr 22.22; Pr 29.7; Pr 29.13; Pr 29.14; És 1.17; És 11.4; És 25.4; És 32.7; És 58.6-7; És 61.1; Jr 5.28; Ez 16.49; Ez 22.29; Am 2.6; Am 5.11-12; Zc 7.10; Mt 5.3; Mt 6.2-3; Mt 19.21; Lc 3.11; Lc 4.18; Lc 14.13; Lc 14.21; Lc 18.22; Lc 19.8; Ac 9.36; Ac 10.31; Rm 15.26; 2 Cr 9.9; Ga 2.10; Jc 1.27; Jc 2.5

3 Pour lire l’étude, voir Mark Russell, The Missional Entrepreneur, 2021. 

4 C’est ce que le Mouvement de Lausanne appelle « un évangile entier », qui prend en considération l’ensemble de la personne que Dieu a créé et pas juste sa dimension spirituelle. 

Au sujet de l'auteur

Élizabeth Lecavalier

Originaire de Laval, Élizabeth vit à Montréal, où elle exerce un ministère comme aumônière avec P2C-Étudiants. Elle est également étudiante au doctorat à l’Université Laval et possède beaucoup trop de livres pour un être humain normalement constitué. Elle est plus heureuse lorsqu’elle savoure une bonne tasse de café (ou une bonne histoire!) ou lorsqu’elle explore le parc du Mont-Royal avec sa sœur.