Je suis sortie de mon sommeil.

C’est en écoutant l’épisode du podcast Undiscussed de P2C-Students sur le racisme avec le rappeur Propaganda que c’est arrivé.  À la fin de l’épisode, l’artiste met au défi ceux qui l’écoute de porter attention à leurs bibliothèques et leurs listes de lecture.  Est-ce que les auteurs et les intervenants sont majoritairement issus d’un même milieu culturel?  Est-ce que tu vois un schéma qui se répète? 

Il a continué en révélant que nous laissons passivement la culture dominante dicter les voix que nous écoutons. Le défi qu’il nous lance alors est de devenir intentionnel.le.s et d’écouter les voix des auteur et des artistes de différentes cultures et origines ethniques.

Jeune homme qui sourit en regardant son téléphone

Dans cet épisode, Propaganda soutient que cultiver l’habitude d’écouter des points de vue culturellement différents façonne notre façon de penser et nous permet de grandir dans notre compréhension et notre empathie envers les autres. J’ai été frappé par son commentaire et j’ai relevé le défi. 

J’ai inspecté mes bibliothèques et j’ai trouvé C.S. Lewis, Timothy Keller, Charles Dickens et J.P. Moreland, pour n’en citer que quelques-uns. Et j’ai remarqué une tendance. J’avais une liste d’auteurs qui étaient principalement des hommes blancs. J’étais choquée: comment se faisait-il que je ne m’en étais pas encore rendue compte? Comment est-ce que c’est arrivé?

Livres sur une biliothèque
Livres sur une table

À la recherche de voix diverses

Cette découverte a créé en moi le désir pour plus.  J’avais besoin de m’approprier ces voix diverses. 

Je suis Canadienne d’origine haïtienne. Mes parents ont immigré à Montréal dans les années 70. Mon frère, ma sœur et moi sommes nés à Montréal et ma famille a déménagé à Ottawa lorsque j’avais quatre ans. La première fois que j’ai pris conscience de la question de la race, c’est lorsqu’on a déménagé dans un quartier majoritairement blanc et que j’ai commencé à fréquenter des écoles (primaire et secondaire) où les enseignants étaient tous blancs.  Tu peux probablement imaginer que mon mois préféré est devenu le Mois de l’histoire des Noirs (en février), mais la célébration n’a duré qu’une semaine.

Je n’ai jamais remis en question le fait que j’attendais la semaine de l’histoire des Noirs pour reconnaître la dignité des auteurs, contributeurs et intellectuels noirs qui ont fait la différence dans l’histoire contemporaine. Maintenant que j’y pense, c’est un riche héritage qui était mis de côté, une culture qui était sous-estimée le reste de l’année. Je trouve que l’exclusion des voix de cultures diverses de la culture dominante est une affirmation subtile que leurs voix et leurs perspectives ne sont pas importantes ou valorisées. C’est un rejet évident de ce qu’ils apportent au monde. 

#Wokechurch

Récemment, j’ai entendu ce mot à la mode « #wokechurch ». Dans un article que j’ai lu intitulé « Woke is… » de Thabiti Anyabwile, membre du conseil de la Gospel Coalition, Anyabwile explique que l’afrocentrisme des années 1980 a donné naissance au concept de « woke » pour définir la conscience de soi des communautés noires qui centrent intentionnellement leur vision du monde sur l’Afrique et les peuples d’origine africaine. Ce centrage sur l’Afrique et les peuples d’origine africaine est le résultat de la remise en question du paradigme dominant de l’eurocentrisme.

En ce qui me concerne, être « woke » veut dire être une Canadienne noire consciente de sa culture africaine et avoir une réflexion critique sur la culture canadienne dominante actuelle. Je fais exprès pour trouver des perspectives culturellement diverses dans le but d’élargir mon appréciation de l’intention de Dieu pour la diversité culturelle. 

Mais pour être honnête, je ne remet pas régulièrement en question le paradigme dominant; ça m’arrive d’être passive. Et dans ces moments-là, j’ai l’impression d’avoir appuyé sur le bouton « snooze ».

Je dois agir

J’ai réalisé que je devais chercher consciemment ce qui manquait dans mes bibliothèques. Je devais être intentionnelle. Je ne pouvais pas laisser passivement la culture dominante dicter les voix dont je m’inspire. J’ai donc commencé à rechercher activement des voix différentes. Par exemple, j’ai entendu une citation d’une femme auteure de la Renaissance de Harlem, Zora Neal Huston (1891-1960), tirée de son livre How it feels to be Colored Me. J’étais loin de me douter que cette citation décrirait l’histoire de mon enfance à Ottawa. Voici la citation à laquelle je me suis identifiée:

    « Je me sens le plus coloré (colored) lorsque je suis projeté sur un fond blanc et net… Au bord des eaux de l’Hudson, je sens ma race. Parmi les milliers de personnes blanches, je suis un rocher sombre sur lequel on déferle et que l’on balaie, mais à travers tout cela, je reste moi-même. Quand les eaux me recouvrent, je suis, et le reflux ne fait que me révéler à nouveau ».

J’ai aussi entendu une citation d’un philosophe noir appelé Howard Thurman (1900-1981) et je devais lire son livre intitulé Jesus and the Disinherited. La perspicacité de Thurman révèle un fait historique que l’on oublie facilement, à savoir que Jésus, en tant que Juif ayant grandi dans un Israël dominé par les Romains, comprenait ce que l’on ressent lorsqu’on est opprimé et défavorisé. Thurman explique comment l’Évangile s’adresse aux personnes privées de leurs droits.

Ma découverte n’est pas terminée et je consulte maintenant intentionnellement South Asia Bible commentary: A One-Volume commentary on the Bible et le Commentaire Biblique contemporain: Un commentaire écrit… par 70 théologiens africains quand j’ai besoin d’une explication d’un texte biblique.

La lecture de ces voix diverses a eu un effet sur ma foi personnelle. J’ai découvert la beauté de la diversité.

Je me suis rappelée de la division entre les Juifs et les Gentils dans l’église d’Éphèse, et de la manière que le Saint-Esprit révèle à Paul qu’en Christ, deux groupes de personnes hostiles deviennent un nouvel être humain, une nouvelle famille (Ephésiens 2:14-22).  On peut aussi lire dans l’Écriture que devant le trône de Dieu, il y aura des gens de toute tribu, de toute langue et de toute nation (Apocalypse 7,9). Tous ces groupes sont unis en Christ; ils font tous partie de cette belle mosaïque de diversité unie en Christ.

Cela a fait naître de l’espoir dans mon imagination.

Pourquoi est-ce que c’est important?

Dieu a créé la race humaine, et à ses yeux, nous sommes tous égaux.  Par contre, les classifications des êtres humains selon des traits extérieurs sont des distinctions créées par l’humain, et prétendre qu’une ethnie est supérieure ou inférieure à une autre est un péché. Ces affirmations peuvent être franches et audacieuses, ou subtiles et difficiles à percevoir à la surface du comportement et de la pensée. 

La vision chrétienne du péché est qu’il est dans notre nature, qu’il ne peut pas être évité et qu’un sauveur est notre seul espoir. Seul Jésus-Christ, le Fils de Dieu, est entré dans l’histoire de l’humanité sans péché. Il s’est occupé du péché qui est dans notre nature lorsqu’il est mort sur la croix à notre place.

De plus, la cause première du racisme est l’orgueil. Jésus est mort, a englouti en lui le péché du monde et est revenu à la vie, vainqueur du péché et de la mort. Lorsqu’on se détourne de nos pensées et actions pécheresses pour revenir vers Dieu (repentance) et qu’on accepte son intervention divine, nos cœurs sont transformés. On peut célébrer nos particularités ethniques sans prétendre qu’une ethnie est plus importante qu’une autre.

Jésus nous permet de voir et d’apprécier les gens à leur juste valeur.

Jeunes femmes souriantes

Tu veux aller plus loin?

Après avoir lu les moyens par lesquels Jésus peut transformer nos cœurs et nous permettre de nous voir les uns les autres avec justesse, tu peux te demander : « Comment se fait-il que les disciples de Jésus ne font pas une meilleure job pour être des exemples d’égalité ? »

…Tu peux appuyer sur le bouton « snooze » ou…

Explorer par toi-même des voix diverses.


Note de l’éditrice

Pour aller plus loin par toi-même, écoute l’épisode (en anglais) de Undiscussed avec Propaganda que Rebecca mentionne dans son article:

Ou écoute cet épisode de J’ai des questions qui aborde la question de l’importance de vivre sa foi de manière à respecter ta culture ethnique, une entrevue d’Élohise et Christina avec Rici Be et Yanie Pierre-Jérôme.

Au sujet de l'auteur

Rebecca Louissaint

Parfaitement trilingue (parler créole, ça compte!)
Graduée de Tyndale University College & Seminary, elle fait actuellement partie des équipiers de P2C-É à l’Université de Toronto, au campus St-George.
Lorsqu’elle ne travaille pas avec les étudiant.e.s et qu’elle cherche à se ressourcer, Rebecca aime courir, faire du vélo et nager. Rebecca se considère comme une diva haïtienne pour le Christ!