Ma très chère Mary-Lou, 

Je suppose que tu n’avais pas pensé que tu deviendrais ma mentor. Tu t’es retrouvée avec plus que ce que tu avais prévu. Lorsque tu m’as invitée, une petite fille de neuf ans, à venir prendre des leçons d’équitation, je parie que tu ne t’attendais pas à ce que je sois encore dans ta vie seize ans plus tard.

Au début, tout tournait autour des chevaux; comment notre amitié improbable est-elle devenue un tel point d’ancrage dans ma vie? 

Tu m’as appris à brosser les chevaux, à les monter, à ne pas me laisser intimider par un animal d’une demi-tonne. Te souviens-tu quand je ne pouvais pas porter la selle “Big Horn”, et encore moins la soulever au-dessus de ma tête pour la mettre sur le dos de Scruffy? Et c’était la plus petite des juments! Je suis maintenant plus grande et Scruffy est décédée il y a des années; entre-temps, tu as été pour moi une mentor de nombreuses façons. 

Tu es probablement surprise que je t’appelle mentor, en protestant que tout ce que nous avons fait est de passer du temps ensemble. Mais c’est le but, justement! Tu as investi en moi en étant présente.

Bien entendu, une partie de ce que tu m’as appris était intentionnelle: ne pas toucher la clôture électrique était une bonne première leçon. Mais, plus important encore, tu as été pour moi un modèle, un exemple. Plutôt que de me dire comment vivre ma vie, tu me l’as montré. 

Tu m’as montré comment faire confiance à Dieu alors que tu vis d’un chèque de paie à l’autre. Ta dépendance sur sa générosité est une démonstration de sa bonté. 

Tu m’as montré que la vie d’une femme non-mariée, bien que difficile, peut aussi être très agréable. Grâce à toi, je n’ai pas peur de la vie de célibataire. 

En te donnant entièrement aux autres, tu m’as montré ce qu’est la vraie générosité. Tu donnes avec tellement de joie!  

Tu m’as montré que, même quand tu fais face à l’adversité, il est possible de rire courageusement et de continuer à espérer encore une fois l’intervention de Dieu. Et il le fait. Pour toi, il le fait toujours. 

Cela me pousse à me demander: malgré toute mon intentionnalité et le temps que je passe à planifier des leçons pour ceux que j’accompagne dans le mentorat, qu’apprennent-ils vraiment de moi ?

Qu’est-ce que je leur montre réellement? Et quelles sont les vies que j’influence sans être consciente de mon impact?

Il est vrai que je vois en moi des choses de toi que je n’aime pas.

J’ai sans doute appris mes premiers gros mots grâce à toi.

J’ai peut-être eu quelques éclats de colère qui ressemblent beaucoup aux tiens.

Je suis loyale à l’excès.

Je ne te reproche rien de tout cela, même si je me demande quels sont les défauts que je transmets aux autres. Mais tout comme toi, j’apprends à rire de moi-même, en choisissant de croire que Dieu peut utiliser toutes choses, même mes défauts, pour le bien. 

Et il y a aussi des choses en toi que j’aime, mais que je ne serai jamais, peu importe combien de temps je t’appellerai ma mentor.

Même si je suis devenue plus habile dans mes conversations, je ne serai jamais aussi sympathique ou bavarde que toi.

Je ne serai jamais aussi déterminée ou prête à affronter les problèmes de face.

Et je n’apprécierai jamais le café.

Mais s’il y a des limites à la façon dont tu peux former la personne que je suis, c’est une réalité du mentorat, plutôt qu’un défaut de ta part. Car une bonne mentor ne crée pas une copie conforme d’elle-même, mais invite une personne à devenir plus pleinement celle que Dieu veut qu’elle soit. 

Te souviens-tu de ta remorque à chevaux rouge vif rayée de blanc avec les enjoliveurs chromés qu’un voisin t’a donnée à l’improviste l’année dernière? J’ai prié pour cette remorque.

Quand j’étais petite, j’avais l’habitude de demander régulièrement à Dieu de te donner de jolies choses: un nouveau véhicule, un tracteur, et oui, une remorque pour chevaux. Je vois maintenant qu’avoir des choses matérielles n’est pas ce qui est le plus important dans la vie. N’importe qui peut accumuler et distribuer des choses aux autres.

Mais transmettre un caractère vertueux?

Croire en l’autre jusqu’à ce qu’il rayonne de courage?

Offrir de porter l’histoire de quelqu’un et l’aider à grandir?

Ça c’est spécial. C’est ça le mentorat. C’est un don du même Dieu qui est assez gentil pour se souvenir de  mes petites prières simples pour une remorque à chevaux, en en laissant tomber une sur ta pelouse. 

Tu m’as formée. Évidemment, au final, c’est Dieu qui me forme. Mais il t’a utilisée dans ma vie de façon à la fois connue et inconnue. Je suis reconnaissante à Dieu d’avoir orchestré tout cela, parce que devenir plus semblable à Jésus grâce au mentorat de personnes ordinaires serait impossible sans lui. Une fois de plus, il a fait une chose merveilleuse.

Et chapeau à toi Mary-Lou: merci d’avoir été ma mentor.

Au sujet de l'auteur

Sam Robins

Sam aime écrire: des articles de blogue, des nouvelles, de la poésie, et même des travaux universitaires au McMaster Divinity College, à Hamilton, ON. Sinon, tu trouveras probablement Sam en plein air, que ce soit sur une bicyclette, dans un canoë ou quelque part perdu dans les bois.