Il y a quelque chose d’étrange dans ce deuxième couplet d’un vieux chant de Noël que tu connais peut-être:

Il vient à notre appel combler nos cœurs, Emmanuel!

Ô viens, Berger, que Dieu nous a promis,

Entends au loin ton peuple qui gémit;

Dans la violence il vit son exil,

De ses souffrances, quand renaîtra-t-il?

Je suis surprise que cette chanson – chantée pendant une saison connue pour sa musique festive, ses lumières scintillantes et ses moments passés en compagnie d’êtres chers – parle d’un peuple qui gémit et d’un exil vécu dans la souffrance. 

On a souvent l’impression qu’il n’y a pas de place pour la tristesse et le deuil à Noël – la plupart des traditions des fêtes existent justement pour égayer la vie et chasser l’obscurité et le froid.

Mais, pour plusieurs d’entre nous, le fait d’être entouré de la lumière des fêtes est souvent le douloureux rappel de nos propres souffrances – des personnes qui ne sont plus là pour célébrer avec nous, des circonstances qui nous plongent dans l’amertume et la tristesse.

Se retrouver seul.e dans le froid

Je me suis retrouvée dans cette triste situation, un soir de tempête de neige et que je me promenais devant les maisons ornées de lumières de Noël de mon quartier en sanglotant et en criant dans la nuit noire et glaciale. 

Cette nuit-là, j’ai réalisé que j’allais retourner dans ma ville natale pour les vacances d’hiver et célébrer mon premier Noël sans l’un de mes meilleurs amis, un ami que j’aime profondément, qui était soudainement décédé plus tôt dans l’année. J’étais en colère et désespérée, et j’avais l’impression que la culture qui entoure  Noël ne faisait rien pour me sortir de cet état.

À l’époque, je ne pouvais pas imaginer ressentir de la joie et fêter Noël sans mon ami. À l’époque, je ne savais pas non plus comment expérimenter Noël à l’intersection de la joie et la douleur, dans une tension pleine d’espoir.  

Que ce soit nos circonstances qui sont difficiles ou que l’on ait perdu un être cher, ça peut être difficile et frustrant de trouver l’espace mental pendant les fêtes pour se reposer et pour réfléchir au désespoir qui pèsent sur nos cœurs.

On a peur de nuire à l’esprit des fêtes si on évoque la douleur qui touche nos vies, alors on évite d’en parler. Mais, au final, faire semblant d’être joyeux est épuisant quand la joie est si loin de notre réalité.

La douleur dans l’attente d’un Sauveur

Contrairement aux histoires qu’on retrouve dans les films de Noël et les comédies romantiques du type Hallmark, la véritable histoire de Noël fait une place importante au deuil.

L’histoire de Noël ne commence pas avec un nouveau-né dormant paisiblement dans une crèche sous une nuit étoilée, entouré d’une foule en adoration.

Le récit commence par un besoin urgent et désespéré de trouver le salut pour ‘’le peuple qui marchait dans les ténèbres‘’ (Ésaïe 9, 1). L’histoire commence par la lamentation sincère d’un peuple face à la douloureuse réalité du péché et de la misère causée dans nos communautés, en nous-mêmes et dans notre monde.

Depuis le récit d’Adam et Eve jusqu’à 400 ans après la fin de l’Ancien Testament, le cri de douleur pour un Sauveur résonne à travers l’histoire.

Passer sous silence ou même ignorer ce profond désir et ce deuil minimise l’ensemble de l’histoire de Noël. En cette saison, on ne peut pas ignorer les centaines d’années d’attente dans l’obscurité.

Réfléchir à la souffrance de notre vie à Noël c’est aussi l’occasion de ressentir les mêmes sentiments d’attente et d’impatience qui ont précédé l’arrivée de Jésus sur terre.

Le doute, la confusion, la colère, le désespoir, la tristesse – le peuple de Dieu les ont certainement ressentis avant la venue du Messie et nous les vivons encore aujourd’hui, surtout dans notre attente du retour de Jésus.

Retour à la lumière

Mais être en deuil à Noël ne signifie pas être sans espoir.

Une fois qu’on comprend la profondeur de notre douleur,  il y a de la place pour que notre besoin d’un Sauveur soit comblé et pour la joie qui en découle. Et la phrase « O viens » reconnaît cet espoir dans le fait qu’il est entièrement chanté à la lumière de l’avenir. Le chant implore Emmanuel de venir et de combattre la nuit, la captivité, l’exil et l’ombre de la mort qu’Israël éprouve au moment du chant:

Ô viens, Jésus, tracer notre chemin,

Visite-nous, Étoile du matin,

Du fond de nos regards fais monter

L’éclat soudain du jour d’éternité.

L’appel à chanter qu’on trouve dans le refrain n’est pas destiné à l’avenir – il est destiné au présent, même dans l’attente. C’est une affirmation répétée avec certitude à maintes reprises dans le refrain qu’un Sauveur viendra – et cette promesse est une raison suffisante pour se réjouir:

Chantez, chantez, il vient à notre appel

combler nos cœurs, Emmanuel.

On ne peut pas vivre et apprécier pleinement la lumière de Noël si on ne se souvient pas des ténèbres qui l’ont précédée, des ténèbres qui existent encore aujourd’hui.

Le peuple qui marchait dans les ténèbres

a vu une grande lumière,

sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre de la mort

une lumière a brillé.

Esaie 9:1

Quand on fait de la place dans notre vie pour le deuil pendant les fêtes, on fait en même temps de la place pour l’espoir que représente l’arrivée du Christ. On peut se rappeler qu’il y a de la lumière après les ténèbres, qu’il y a un Sauveur qui est déjà venu pour racheter nos vies brisées.

Ainsi, à Noël, souviens-toi de ceux qui sont affligés – fais de la place pour que ceux qui sont dans un lieu de solitude et de deuil puissent se sentir à l’aise d’exprimer pleinement leur douleur. Soyons présents auprès de nos amis et de notre  famille qui ont vécu une année difficile et montrons leur que leur douleur ne passe pas inaperçue.

Je n’oublierai jamais ce que ma coloc’ a fait pour moi lorsque je marchais dans cette sombre nuit enneigée. Elle m’a suivie dehors et s’est assise avec moi dans le froid, m’écoutant pleurer face au vent, me donnant un espace pour exprimer pleinement mon chagrin.

Et puis, après les larmes, elle m’a rappelé que Dieu me voyait pleinement en ce moment même, ce Dieu qui promet de restaurer les parties de ma vie brisées par toutes les choses qui me sont arrivées – et j’ai pu écouter et recevoir cette vérité, même si je n’y croyais pas encore tout à fait.

Si tu vis dans le deuil en ce temps de Noël, je veux que tu saches: il y a de la place pour toi dans cette saison. Il y a de la place pour tes larmes, ta  colère, ton amertume et tes doutes. Dieu te voit, t’aime et il souffre avec toi, même si tu ne peux pas le voir ou le ressentir.

Reste dans l’obscurité pour l’instant, aussi longtemps que tu en auras besoin, mais souviens-toi et accroche-toi à cet espoir: la lumière arrive pour toi.

Au sujet de l'auteur

P2C-Étudiants

Pouvoir de Changer – Étudiants existe afin de faire connaître Jésus dans les universités et les cégeps du Québec. Nous accompagnons les étudiants dans leur cheminement vers Jésus, les aidant à voir la pertinence de l’évangile pour toute la vie.